Les rêves de plus ... page 69

On me demande souvent si je pense à avoir un autre enfant. La réponse pourrait être tellement simple, mais pas avec notre vie. Avoir un enfant en situation de handicap et sans autonomie brise malheureusement beaucoup de ce que l'on avait espéré au début. La rencontre, l'amour naissant, le désir, l'envie d'agrandir notre famille et surtout l'envie de créer cet être qui venait accentuer notre amour pour toujours. Mais dès la première année de Colette, j'ai du faire face au deuil. Le deuil de mes envies, de mes attentes et surtout celui de rencontrer une petite fille qui n'était pas du tout comme je l'avais imaginé. Je ne pourrai jamais dire que je referai exactement la même chose, se serait mentir.

Mais vient cet amour que l'on attendait et qui est devenu encore plus grand. Un peu comme un défi intérieur, elle nous transcende tous les jours. On ne peut pas être insensible à Colette, c'est impossible. Car la vulnérabilité , la beauté, la gentillesse et ce 0 autonomie nous oblige presque à ployer le genou. Elle est une flamme qui consume tout doucement, qui apporte tellement de chaleur dans notre coeur que ma réponse est nette et précise : non.

Non je n'arriverai pas à avoir un autre enfant... Et pourtant croyez moi, ce n'est pas l'envie qui manque... Mais je n'ai plus la force de donner autant d'amour pour une autre personne. J'aurais tellement aimé avoir cette force , parce que clairement c'est un rêve de plus. Un tout petit. Quand je vois les bébés de nos amis parfois, j'ai ce petit pincement au coeur que nous parents de Coco aurons toujours. Ces petites phrases qui viennent par ci par là pour dire : et si elle avait été comme ca ou alors regardes ce qu'il arrive à faire à tout juste quelques mois. La comparaison résonnera perpétuellement.

Et puis il y a la peur. Il serait fou de dire que nous ne craignons plus rien. N'ayant toujours pas trouvé la maladie de Colette, nous ne savons pas comment aboutirait une autre grossesse. Quelles sont les chances aujourd'hui d'avoir un enfant sans handicap ? Comment ferions nous si vers la fin de la grossesse on m'annonçait une terrible nouvelle, le handicap de notre futur bébé ? Prendre ce chemin une fois mais ne plus vouloir s'y aventurer, jamais. Parce que même si Colette est une petite fille extra - ordinaire cela nous détruirait de devoir repasser par tout cela. Nous sommes déjà si abimés ...

Il est difficile aujourd'hui pour moi en tant que femme, en tant que maman de mettre cette envie dans un tiroir. C'est un peu fermer une porte qui aurait pu ouvrir des possibilités avec plein de petits mots qui transpercent les mur d'une maison : maman, papa , Nastia... De petites mains qui viendraient nous agripper et de rires à n'en plus finir. Mais notre Coco est unique et ce lien si particulier que nous avons est primordial et exclusif. C'est juste une très grande tristesse pour nous deux, car heureusement Nastia vient remettre de l'équilibre dans la balance et surtout panser mon coeur de maman. Mais je pense à celui qui me tient la main, celui avec qui je partage ma vie et qui aurait lui aussi un rêve de plus...